En 1866, le vieux Rossini pose un regard plein de nostalgie sur l’art des castrats. « Leur suppression, écrit-il à l’historien Ferrucci, fut à l’origine de l’affreuse décadence du bel canto italien ».

« Affreuse décadence », en 1866 ! Mais qu’entend le compositeur de La Cenerentola et de Semiramide par bel canto ?

Ce beau chant remonte à la fin du XVIIe siècle. Il avait pour principe, non l’expression naturelle, mais l’essor surnaturel de la voix humaine vers les régions de l’âme où la parole n’a pas accès. De la « roulade » si décriée, que nous appelons aujourd’hui vocalise, Balzac dit même qu’ « elle traverse l’espace en semant dans l’air ses germes qui, ramassés par les oreilles, fleurissent au fond du cœur ».

Mais il n’y a pas que la roulade et le sport vocal. Ce beau chant touche d’abord par la maîtrise du souffle, l’onction de la ligne, la variété des couleurs – des coloratures exactement. Un jour qu’on demandait à Dame Joan Sutherland de définir le bel canto, elle répondit : « l’aigu piano ».

Si Rossini regrette le temps de Farinelli, lui-même appartient à cette première école romantique qui, non seulement ne veut pas renoncer aux prestiges du chant comme religion, mais lui ouvre des horizons inattendus. Ses successeurs Bellini et Donizetti à leur tour rendront hommage à cette conquête majeure de la culture italienne. Verdi même, qui s’était d’abord imposé contre l’ornement, finit dans Rigoletto ou La Traviata par pratiquer en maître cette ancienne magie.

C’est donc à eux que l’Académie de la voix consacrera sa cinquième édition, au cours d’une semaine aux Treilles dont le professeur invité sera l’immense belcantiste Patrizia Ciofi. Style, syntaxe, technique, répertoire, qui mieux que la soprano toscane peut transmettre aux jeunes artistes les secrets de ce chant tout à la fois sensuel et céleste ?

Direction : Ivan Alexandre, musicologue, metteur en scène, assisté de Julien Benhamou, conseiller artistique en charge du casting du Festival International d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence et d’Alain Perroux, directeur de l’Opéra national du Rhin.

Professeur invitée : Patrizia Ciofi

Sonorisation